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Gala, la muse de Salvador Dali

 

 

L’amour que Dali portait à Gala a éclos lors d’un été passé au soleil de Cadaquès. Dans le but de capter l’attention de Gala, Dali s’est adonné à toutes sortes d’ extravagances : il s’est épilé les aisselles à la cire, les a teint en bleu, s’est tartiné le corps d’excréments de chèvre, a orné sa tête d’ un géranium rouge… Quand il la rencontrait, son émotion était telle qu’il ne pouvait lui parler sans être pris de fous rires incontrôlables. Un après-midi, lors d’une ballade au Cap de Creus, il a fini par lui déclarer sa flamme. Il s’est agenouillé devant elle et, secoué d’un rire nerveux, lui a dit qu’il l’aimait. Gala lui a alors pris la main et lui a répondu simplement : « Mon petit, nous n’allons plus nous quitter ».

Grâce lui soit rendue. Car Gala était pourvue d’une ingéniosité capable de soutenir sans faille les délires de Dali et de l’éclairer dans ses démarches,  mais aussi d’une personnalité suffisamment forte pour faire contrepoids au moi de l’artiste et lui fixer des garde-fous,  lorsque la création, le conduisant à jouer tout à la fois avec son subconscient et son moi, l’entraînait trop loin.

Par évidence, elle devint sa plus grande et sa plus splendide inspiration. Dali, plus particulièrement, était fasciné par le dos de sa femme. Il a écrit dans Vie secrète : « Son corps avait une complexion enfantine, ses omoplates et ses muscles lombaires cette tension un peu brusque des adolescents. En revanche, le creux du dos était extrêmement féminin et liait avec grâce le torse énergique et fier aux fesses très fines que la taille de guêpe rendait encore plus désirables. »   Mais la présence de Gala, par le pouvoir qu’elle avait d’abolir en lui toute pensée rationnelle et logique, le mettait aussi, de manière idéale, dans les conditions que requiert  le surréalisme. A ses côtés, Dali se mit à peindre furieusement et sans relâche.

Parmi les tableaux de Dali où apparaît Gala, il faut mentionner celui intitulé Gala regardant la mer Méditerranée qui à vingt mètres se transforme en portrait d’Abraham Lincoln, 1976. C’est une toile très curieuse que Dali a peinte en pensant à son adoration pour Gala, et où le portrait de Gala vient se fondre avec celui d’une autre icône : le visage d’Abraham Lincoln qui orne les billets américains de cinq dollars – évoquant, elle aussi, le désir. La première chose que l’on voit est le corps de Gala, de dos, face à la mer. Mais si l’on s’éloigne, apparaît alors le visage de Lincoln.

 

 

Certes, l’association du corps de la femme à l’argent pourrait relever d’une représentation de l’amour vénal. Mais le tout se trouve sublimé par la forme qui lui est donnée, celle d’une croix, et par l’alliance d’eau et de feu qui vient illuminer cette croix et lui conférer une dimension mystique. En bas, à gauche du tableau, dans une partie vert sombre, deux petites images reprennent les portraits de Gala et Lincoln, mais séparés cette fois. Ils nous donnent la clé du tableau, et nous montrent comment l’art de Dali  procède  par associations d’images en même temps que par transfiguration.

 

Milena Sintomer – L1 Humanités