Société de l'information, droits et médias

Le tribunal de l’UE a rendu le 8.09.2016, la première décision européenne statuant sur les accords de report d’entrée, propres au secteur pharmaceutique. Ils consistent en un paiement de la part d’un laboratoire princeps à un fabricant de génériques potentiellement concurrent en contrepartie d’un report de son entrée sur le marché. L’enjeu économique est de taille, et les conséquences de ces accords sur la santé publique et l’intérêt général mènent à une interrogation relative à l’apport de la jurisprudence européenne en la matière depuis ce premier arrêt. Il conviendra d’analyser les positions françaises et allemandes face à cette décision.

Dans l’arrêt Matal v. Tam rendu le 19 juin 2017, la Cour Suprême des Etats-Unis déclare qu’ « Un discours ne peut pas être interdit au motif qu’il exprime des idées qui offensent » . Ainsi la Cour adopte une conception extrêmement étendue de la liberté d’expression, et ce pour protéger l’enregistrement des marques qui pourraient « dénigrer, porter atteinte ou discréditer toute personne vivante ou décédée ».

Le lien hypertexte permet l’accès facilité au contenu d’une page internet. Deux situations entrainent la responsabilité du fournisseur du lien dans l’Union européenne : (1) si le contenu pointé est protégé par des droits d’auteur, l’Union européenne interdit la communication à un public nouveau sans l’accord de l’auteur, (2) le fournisseur du lien agissant dans un but commercial est présumé avoir la connaissance de l’illicéité du contenu pointé. Les États-Unis sont plus souples dans leur approche mais utilisent les mêmes critères de la connaissance et de la lucrativité. 

À l’ère de la « yelpisation » des relations commerciales, les avis en ligne occupent une place importante dans la compétitivité d’une entreprise. Aux États-Unis, le Consumer Review Fairness Act de 2016 interdit les clauses censurant les avis critiques des consommateurs, aux dépends de la liberté contractuelle. En France, ces stipulations sont écartées par le régime des clauses abusives et le droit de se plaindre est confirmé par la loi pour une République numérique. Observe-t-on un réel rapprochement des deux systèmes ?

La Cour de Justice de l’Union Européenne a, le 13 mai 2014, dans sa décision Google Spain c/ AEPD et Mario Costeja Gonzales consacré pour la première fois le “droit à l’oubli numérique. En réalité il s’agissait surtout d’un droit au déréférencement, mais avec l’entrée en vigueur du Règlement Général sur la Protection des Données à Caractère Personnel 2016/679, ce droit sera étendu à un veritable droit à l’effacement. Cette décision qui impliquait aussi la maison mère de Google située aux Etats-Unis a suscité énormément de débat et de controverse des deux bords de l’Atlantique. Elle a fait notamment ressortir l’écart entre l’Europe et les Etats-Unis de l’équilibre entre le droit au respect de la vie privé et la liberté d’expression.

« Ce cas ne concerne pas qu’un téléphone. Ce cas concerne l’avenir (..) Décider de compromettre la sécurité encadrant nos informations personnelles pourrait conduire à mettre en péril notre propre sécurité. C’est la raison pour laquelle le chiffrement est devenu si important (...). » Tim Cook PDG d' Apple Inc (ABC News interview du 24 février 2015).

 

"L'Internet se nourrit de nombreuses créations de l'esprit : sons, images, textes,.. et suscite la création de nouvelles œuvres. " (Le droit de l'Internet, Vincent Fauchoux, Pierre Deprez, Jean-Michel Bruguière). Se pose alors la question de la protection de ces œuvres exposées sur la Toile, à la vue de tous.

« Je hais vos idées, mais je me ferai tuer pour que vous ayez le droit de les exprimer » écrivait Voltaire. A l’instar de l’imprimerie de Gutenberg, qui a favorisé en son temps la diffusion des idées de la Réforme, Internet permet aujourd’hui de diffuser d’une manière différente son opinion, sa pensée. Du Mouvement « Occupy »[1] au Printemps Arabe[2], Internet est apparu comme une opportunité incroyable pour exercer la liberté d’expression.

En 2015 le club allemand de football de Wolfsburg avait étonné le monde du foot en recrutant Benedikt Saltzer, le champion d'Europe de Fifa... un jeu vidéo ! Cela peut paraitre surprenant en Europe, mais en Corée du Sud, le jeu vidéo est depuis quelques années déjà un sport. Et ce phénomène arrive maintenant en Europe.
Utilisant les nouvelles technologies comme support, l'e-sport n'a pas encore un cadre juridique adapté. Pour favoriser son développement en Europe, plusieurs États ont commencé à s'y intéresser.

La reconnaissance de la compétence des juridictions d’un Etat ne se fait pas ex nihilo. Des règles de compétence s’imposant aux systèmes juridiques territoriaux déterminent quelles juridictions sont compétentes en tenant compte de la matière du litige et de l’autonomie des parties mais aussi en considération de critères géographiques et/ou personnels. Qu’en est-il pour les litiges sur Internet ? La CJUE a apporté une réponse adaptée à cette délicate question au regard de l’ubiquité d’Internet. Sa jurisprudence guide les juges nationaux autant qu’elle interpelle.