Le lock out en Espagne et en France - Par Mélanie GANHAO

            L'exercice du droit de grève peut donner lieu à des conflits entre les grévistes et les non grévistes et ainsi perturber le bon fonctionnement de l'entreprise. Mais face à cela, l'employeur peut mettre en place des stratégies afin de combattre la grève et prendre des mesures extrêmes comme la fermeture de l'entreprise.

Le concept de lock out ou “cierre patronal” en espagnol est apparu en Grande-Bretagne dans les années 1850 et peut être défini comme “la fermeture provisoire d'une entreprise, décidée par l'employeur pour répondre à un conflit collectif (la grève)”.

Si l'on s'en tient aux origines du lock out en Espagne et en France, il faut noter que dans ces deux Etats,le lock out a subi un traitement juridique symétrique à celui de la grève. En effet,  avec la loi du 19 Mai 1908 «coalición y arbitraje» et la loi du 27 avril 1909 «huelgas y coligaciones», on assiste à la reconnaissance à la fois du droit de grève et du « cierre patronal ». Au même moment, les organisations professionnelles se voient conférer le pouvoir de coordinercoordonner les grèves et les «cierres patronales». En 1931, la « ley de contrato de trabajo » vient spécifier les effets de la suspension temporaire de la grève et du lock out.

Après la guerre civile espagnole (1936-1939), on assiste à la prohibition à la fois de la grève et du lock out. Au même moment, en France une loi du 31 décembre 1936 sur les procédures de conciliation et d'arbitrage spécifiait que « dans l'industrie et le commerce tous les conflits collectifs du travail devaient être soumis aux procédures de conciliation et d'arbitrage avant toute grève et tout lock out ». Si le droit espagnol faisait référence dans de nombreux textes au lock out, le droit français, en revanche, ne le mentionnait que très rarement dans les textes.

Le lock out a, pendant longtemps, été pénalement sanctionné en Espagne. Etait réprimée « toute action délictuelle associée à la grève et au lock out » dans une loi de 1921. En 1941, la ley de Seguridad del Estado sanctionnait pénalement les coalitions de patrons destinées à paralyser le travail et la grève des ouvriers. A partir de 1944, l'article 222 du Code Pénal espagnol sanctionnait les lock out « qui avaient pour but de porter atteinte à la sécurité de l'Etat, de perturber le bon déroulement des activités ou la production nationale ».En France, jusqu'en 1864 le Code Pénal visait les coalitions patronales qui visent « injustement et abusivement la baisse des salaires » (article 414 du Code Pénal) mais ne se référait pas au lock out. On affirmait alors que l'interdiction de la grève qui était sanctionnée pénalement était valable pour le lock out.

Face aux nouvelles stratégies syndicales, une tendance consistant à établir un traitement juridique différent pour le lock out et la grève est apparue. Cette tendance est visible tant en Espagne qu'en France mais à des périodes différentes. En Espagne, le décret du 20 septembre 1962 va marquer le premier pas en limitant les mesures répressives contre l'action des travailleurs. Mais c'est en 1978, lorsque le droit de grève est constitutionnellement reconnu, qu'un traitement différencié est établi entre droit de grève et lock out. Le droit espagnol va, en effet, être influencé par les autres pays européens et notamment par la France qui reconnait constitutionnellement le droit de grève en 1946. Le droit de grève acquiert donc tant en Espagne qu'en France une valeur constitutionnelle que le lock out n'a pas.

         Aujourd'hui, tant la Constitution française que la Constitution espagnole de 1981 ne prévoient pas expressément le droit de lock out mais l'article 37.2 de la Constitution espagnole reconnait aux employeurs « le droit d'adopter des mesures de conflits collectifs » et précise que « des conditions devront encadrer l'exercice de ce droit ». De cela, il peut être déduit que le lock out est considéré en Espagne comme un droit civique c'est à dire un droit protégé et accordé à tout citoyen par l'Etat mais dont l'interdiction peut être prononcée par une juridiction.

Dans un arrêt du 8 avril 1981, le tribunal constitutionnel espagnol va jusqu'à énoncer que «la constitution espagnole inclut le lock out parmi les mesures générales de conflit collectif ». Il précise néanmoins que « cela ne signifie pas que la grève et le lock out soient mis sur un pied d'égalité » et expose jusqu'à quatre différences entre la grève et le cierre patronal. Selon lui, « ces différences retirent toute possibilité de parrallélisme entre la grève et le lock out » et il conclu que « n'est pas contraire à la Constitution le fait pour l'employeur d'exercer son pouvoir de police pour assurer la protection des personnes et des biens chaque fois que l'employeur est bien décidé à rouvrir l'entreprise lorsque le risque a disparu ». En revanche, « est contraire à la Constitution tout type de lock out qui empêche l'exercice du droit de grève » (arrêt TC 11/1981 du 8 avril 1981, publié au Boletín oficial del Estado (journal officiel de l'Etat)le 25 avril 1984). Le droit espagnol parait donc admettre implicitement le lock out et sa constitution paraît plus ouverte que le droit français au regard de la possibilité de reconnaitre un droit de lock out.

Pour MOLERO MANGLANO « il faut se rendre à l'évidence que nous ne sommes pas face à un véritable droit mais simplement face à une liberté (…). Le système constitutionnel espagnol est un système qui protège le droit de grève mais qui garde le silence sur le droit de lock out ». Il ne faut pas oublier que la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne évoque « le droit à l'action collective (…) des employeurs ». On peut alors penser que le droit français pourrait à terme faire évoluer son droit.

          Le droit espagnol règlemente aujourd'hui le cierre patronal dans le Real decreto-ley 1/1977 du 4 Mars 1977 sur les relations de travail en fixant les conditions, la procédure et les effets du lock out. En France, au contraire, aucun texte ne mentionne le lock out et c'est la jurisprudence sociale qui en fixe les conditions.

En Espagne, en vertu de l'article 12 du Real Decreto-ley, les employeurs pourront procéder à la fermeture de l'entreprise dans trois hypothèses: s'il y a un danger de violence pour les personnes ou de dommages graves aux biens, s'il y a une occupation illégale de l'établissement ou un danger certain que cette occupation se produise, ou enfin si l'absentéisme ou les retards au travail empêchent gravement le déroulement normal du processus de production. Ces conditions, précise la jurisprudence espagnole, sont indépendantes les unes des autres (arrêt du tribunal Superior de Justicia du 14 janvier 2000, Repertorio Jurisprudencia 977 confirmé par la suite).

Selon la jurisprudence espagnole, la première condition (danger de violence pour les personnes ou de dommages graves aux biens) doit se fonder sur des considérations objectives. Il faut un danger réel, imminent et actuel. Il faut qu'il existe un danger «qui ne peut être évité par l'application de mesures légales qui garantissent la sécurité des personnes et des choses ». Il faut enfin que le danger se manifeste sur le lieu de travail ou sur un autre lieu pourvu que celui-ci soit en relation directe avec le développement des activités de l'entreprise.

Cette première condition se retrouve aussi en droit français dans un arrêt de la Cour de Cassation du 8 décembre 1977 puisque l'employeur a le droit et le devoir de fermer l'entreprise en cas d'impossibilité de maintenir l'ordre et la sécurité des personnes et des biens. L'arrêt précise que la « simple crainte d'événements futurs et incertains » ne saurait suffire (Cass. soc. 8 décembre 1977; Réf: 76-40.594; Bull.soc. N°685 P. 549).

La deuxième condition (occupation illégale de l'établissement) exige que le danger soit certain et immédiat (TSJ Sevilla du 3 juillet 1998, RJCA 2967). L'occupation doit être d'une certaine importance.

La jurisprudence française retient également cette condition puisqu'elle admet le lock out «en cas d'occupation ou lorsque des piquets de grève interdisent tout accès des lieux de travail aux non-grévistes et que, malgré une ordonnance d'expulsion sollicitée par l'employeur, le préfet refuse d'utiliser la force publique pour faire évacuer les ateliers » (Cass. Soc., 6 oct. 1971; Réf: 71-40.105).

La troisième condition (absentéisme ou retard de travail empêchant gravement le processus de production) suppose, selon la jurisprudence espagnole, que la grève n'affecte pas la totalité des travailleurs et que l'absentéisme soit important et préjudiciable tant au niveau quantitatif que qualitatif. Il faut que le processus de production soit gravement perturbé c'est à dire que son déroulement soit paralysé au point de ne pouvoir laisser la possibilité à ceux qui le souhaitent de travailler. Ainsi, cette condition est remplie lorsque les travailleurs bloquent la sortie des produits de l'entreprise engendrant des retards de production (TSJ Pais Vasco 13 Mars 1992, AS 1297). Pour justifier cette condition, la jurisprudence espagnole exige une disproportion entre la situation de l'employeur et du salarié gréviste et cela peu importe que la grève soit licite ou non. Ce concept de disproportion ne se retrouve pas en droit français.

De plus, le droit français se montre plus sévère puisqu'il exige une impossibilité quasi absolue de maintenir l'activité de l'entreprise en raison d'un fait imprévisible et irrésistible (arrêt de la chambre sociale de la Cour de Cassation du 28 juin 1972; Réf: 71-40.459 Bull. n°477 P. 436). L'obligation de poursuivre la production en Espagne paraît donc moins contraignante qu'en France où les juges sont très exigeants avec l'employeur. Néanmoins, cette notion de force majeure retenue par la jurisprudence française est parfois remplacée par celle de « conjoncture contraignante » ou de « situation contraignante » (Soc. du 11  Mars 1992; Réf: 90-42-817 Bull.n°168 P. 104 et du 5 juillet 1995) qui montre alors un assouplissement mettant en avant l'intérêt de l'entreprise.

La jurisprudence française pose une condition de plus par rapport à la jurisprudence espagnole, celle de l'exception d'inexécution qui signifie que l'employeur pourra procéder à la fermeture de l'entreprise lorsque les salariés grévistes auront des revendications illégitimes (grèves illicites) ou des modes d'action prohibés.

           Au regard de cette analyse, et mis à part cette dernière condition qui ne se retrouve qu'en droit français, on constate que le lock out est admis en Espagne dans les mêmes conditions qu'en France.

           Les jurisprudences espagnole et française s'accordent sur plusieurs autres points. Tout d'abord sur le fait que le lock out ne peut empecher l'exercice du droit de grève. En effet, dans l'arrêt du 8 avril 1981, le Tribunal Constitutionnel espagnol a estimé que « le lock out ne peut faire obstacle à l'exercice du droit de grève qui est légitimement exercé et qui est doté d'une valeur supérieure ». Cette solution se retrouve en France dans un arrêt du 27 Mai 1998 où la Cour de Cassation affirme que « le lock out est illicite s'il a pour but de faire obstacle à l'exercice du droit de grève ou d'entraver la liberté de travail ».

Egalement, en droit espagnol comme en droit français, le droit de lock out s'explique par le pouvoir de police de l'employeur. En droit espagnol, dans un arrêt de 1996 le Tribunal Supremo de Justicia de Madrid a estimé que « le lock out s'analyse comme la manifestation du pouvoir de police de l'employeur pour le maintien de l'ordre dans l'entreprise ». En France, c'est dans un arrêt du 2 décembre 1964 qu'il a été jugé que « l'employeur est responsable de l'ordre et de la sécurité de l'entreprise et que par conséquent son pouvoir de police lui permet de procéder à sa fermeture ».

           Les tribunaux espagnols et français distinguent différents types de lock out. On distingue d'un côté le lock out offensif qui regroupe le lock out préventif, le lock out cocomitant à la grève et le lock out utilisé comme mesure de sanction à la fin d'une grève. Le lock out préventif est celui à propos duquel l'employeur prend l'initiative de fermer l'entreprise pour empêcher la grève, pour faire pression sur les grévistes ou pour les sanctionner. Ainsi dans un arrêt du tribunal constitutionnel espagnol de 1987, les juges ont estimé illégal le fait pour un employeur “de procéder à la fermeture de l'entreprise pour empêcher les travailleurs d'exercer leur droit de grève, droit qui est constitutionnellement reconnu”. Cette solution se retrouve en France dans un arrêt du 27 juin 1989 (Réf: 86-45.096; Bull. N°470 P. 285) dans lequel la Cour de Cassation estime “qu'en fermant l'entreprise, la direction avait privé les salariés qui souhaitaient suivre le mot d'ordre national d'un droit constitutionnellement reconnu”.

Le lock out cocomitant à la grève est celui qui est adopté pendant la grève sans aucune raison légale  qui le justifie. En Espagne ce type de lock out est appelé “cierre de intimidacion” car il a pour but de faire pression sur les grévistes.

Le lock out qui est adopté à la fin de la grève, ou “cierre de retorsion” en espagnol, est celui qui empêche les travailleurs qui ont participé à la grève de reprendre leur travail les privant ainsi à titre de sanction de leurs salaires.

Tant en Espagne qu'en France, tous ces types de lock out sont considérés comme illicites par la jurisprudence.

D'un autre côté, on trouve le lock out défensif qui permet, selon le “tribunal Supremo”de protéger les personnes et les biens des conséquences excessivement onéreuses et disproportionnées qu'engendrerait l'exercice du droit de grève (arrêt TS 31 Mars 2000, RJ 7403). C'est le seul lock out considéré comme licite si les conditions prévues dans le Real Decreto-Ley sont remplies.

Enfin, en Espagne on trouve le “cierre encubierto” qui est celui qui se produit par la voie de fait loin des hypothèses et de la procédure prévue dans le Real Decreto 17/1977.

 

            Concernant la procédure à suivre par l'employeur pour procéder au lock out, le droit espagnol et le droit français ne retiennent pas les mêmes exigences.

En Espagne, le « cierre patronal » ne nécessite pas d'autorisation administrative ou judiciaire et peut être ainsi admis unilatéralement par l'employeur.

Selon l'article 13.1 du Real Decreto 17/1977, « l'employeur qui procède à la fermeture de l'établissement doit le faire savoir à l'« autoridad laboral » (équivalent de la direction générale du travail) dans les 12h suivant la fermeture de l'établissement ». C'est une condition nécessaire mais pas suffisante pour la licéité du lock out.

La notification doit se faire par écrit et l'employeur doit indiquer la durée et la cause du lock out. Selon la jurisprudence, l'« autoridad laboral » doit pouvoir intervenir au sein du conflit en proposant des solutions au conflit comme la médiation, la conciliation ou l'arbitrage et doit pouvoir demander à l'employeur de procéder à la réouverture de l'entreprise (TS 21 novembre 1983, RJ 5811).

La réouverture de l'établissement se fera une fois qu'auront disparu les causes qui l'ont motivé, à l'initiative de l'employeur ou à l'instance des travailleurs ou sur requête de l'« autoridad laboral » (article 14 du Real Decreto-ley de 1977).

La fermeture de l'établissement sera limitée « au temps indispensable pour assurer la reprise de l'activité de l'entreprise ou pour changer des causes qui l'ont motivé » (article 13.2 du Real Decreto-ley).

En France, la procédure est différente et plus encadrée puisque la fermeture totale ou partielle devra être précédée sauf urgence (rixes) d'une consultation préalable du comité d'entreprise. Le délai de convocation est de 3 jours sauf en cas d'urgence (Crim. 6 février 1979; Réf: 77-91. 923) ou lorsqu'il y a occupation (Soc. 21 juillet 1986 qui légitime une absence de consultation).

 

            Quant aux effets du lock out, ceux ci sont les mêmes en Espagne et en France.

On peut distinguer les effets du lock out légal et ceux du lock out illégal. Que le lock out soit justifié ou non, il produit des effets sur les relations de travail et sur la protection sociale.

Concernant tout d'abord les effets du lock out légal sur la relation de travail, celle-ci est suspendue. Les obligations des parties sont donc, par conséquent, suspendues. Le lock out produit alors les mêmes effets que la grève c'est à dire que les travailleurs n'ont plus le droit à leur salaire durant la période de fermeture de l'entreprise (article 12.2 du Real Decreto 17/1977 et Cass. Soc. 18 janvier 1979 Terju c/ Société Desnoyers).

Quant à la protection sociale, les travailleurs restent couverts par la sécurité sociale mais l'obligation de cotiser est suspendue pour les employeurs et les travailleurs. Les employeurs restent tenus de payer les prestations auxquelles les travailleurs ont le droit.

En Espagne, le Real Decreto 1251 de 2001 énonce à l'article 7.3 que « la situation de lock out n'empêchera pas la perception du congé maternité » et par analogie le droit espagnol reconnaît aussi le droit à la perception du congé paternité durant le lock out.

Le travailleur n'aura ni le droit à l'allocation pour invalidité temporaire ni à l'allocation chômage pendant le lock out. En France, si le lock out se prolonge plus de 3 jours, le versement des allocations de chômage partiel peut être autorisé par décision du ministre chargé du travail.

En Espagne comme en France, si le lock out est illégal, la relation de travail n'est pas suspendue et l'employeur devra payer aux travailleurs les salaires qui leur seront dus pendant la période de fermeture de l'entreprise.

Dans un arrêt du 11 septembre 1985 , le tribunal superior de justicia de Cantabria a estimé que « les quantités qui sont dues pendant cette période n'ont pas un caractère indemnitaire mais salarial » (TSJ Cantabria 11-9-1985, Aranzadi Social 3227).

L'employeur aura également l'obligation de cotiser pour la sécurité sociale.

 

            En Espagne comme en France, l'employeur qui procèdera à la fermeture de l'entreprise sans qu'aucune cause légale ne soit remplie pourra engager sa responsabilité administrative, pénale ou civile.

En Espagne, l'employeur engagera sa responsabilité administrative si la fermeture de l'entreprise affecte l'exercice du droit de grève des travailleurs. Dans ce cas, il s'agira d'une infraction grave qui sera sanctionnée par une amende allant de 650 € à 6500 €.

L'employeur engagera également sa responsabilité administrative s'il refuse de réouvrir l'entreprise dans le délai prévu par l'« autoridad laboral ». Dans ce cas, il s'agira d'une infraction très grave qui sera sanctionnée par une amende allant de 650 € à 190 000 €.

Sa responsabilité pénale pourra être engagée s'il commet des restrictions au droit de grève. Des peines de prison allant de 6 mois à 3 ans sont prévues à l'article 315 du Code Pénal Espagnol en cas d'abus, d'empêchement, de limitation du droit de grève, ou en cas de violence ou intimidation.

En France, l'article 431-1 du Code Pénal prévoit que « le fait d'entraver, d'une manière concertée et à l'aide de menaces, l'exercice de la liberté d'expression, du travail, d'association, de réunion ou de manifestation est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende”.

Enfin, l'employeur verra sa responsabilité civile contractuelle engagée en cas de lock out illicite et devra réparer et indemniser les travailleurs pour les préjudices causés (Tribunal Spuremo de Justicia Castilla y Leon 2 juin 1997, AS 2337 et Cass. Soc. 23 octobre 1997 Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Lyon c/ Société CIAPEM). Le lock-out est, en effet, considéré par la jurisprudence comme une faute contractuelle. La responsabilité de l'entreprise vis à vis de ses contractants pour inexécution des obligations peut donc être recherchée.

 

            Enfin, il faut noter que la question de la licéité du lock-out demeure l'une des questions les plus discutée en France et en Espagne. L'équilibre est difficile à trouver entre d'un côté, le droit de grève et la liberté du travail des non-grévistes menacés par le lock-out, et de l'autre, l'entreprise qui se trouve affectée. Tant la doctrine espagnole que française sont divisées quant à l'appréciation de la légitimité du lock out.

Pour une partie des auteurs, le lock out est légitime. En effet, ils soutiennent que la constitution a laissé le problème en suspens et qu'on ne peut en déduire qu'elle ait tranché le problème par la négative.

Pour eux le principe d'égalité des armes doit jouer pour garantir la parité entre les parties.

De plus, le lock out doit être apprécié sur le plan des rapports dans l'entreprise. Il s'analyse comme une manifestation des pouvoirs de police et d'administration interne du chef d'entreprise lorsque l'ordre dans l'entreprise est sérieusement perturbé.

Pour une autre partie de la doctrine le lock out est illégitime. En effet, le lock out constitue la violation de l'obligation patronale de fournir du travail au salarié. Si le pouvoir de police l'autorise à prendre des sanctions, ces sanctions ne peuvent être qu'individuelles alors que le lock out est collectif.

Ce débat doctrinal a été relancé par l'accord annexe du Traité de Maastricht qui met à égalité le droit de grève des salariés et le droit de lock out des employeurs mais il est apparu que ce texte n'avait pas la portée que certains auraient voulu lui attribuer. Néanmoins, la Charte sociale européenne qui reconnait à l'article 6§4 un droit d'action collective y compris aux employeurs pourrait avoir une influence et faire évoluer les droits.

 

Bibliographie

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- Francis Lefebvre, “Memento práctico Social”, 2009

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- Miguel Rodriguez-Pinero, “el cierre patronal y su nueva disciplina juridica”,

- Frederico Duran Lopez, “la nueva regulacion de la huelga y del cierre patronal”

- Ignacio Albiol Montesinos,“Compendio de derecho del trabajo”, 2008

- Denis Gatumel, “le droit du travail en France: principes et approche pratique du droit du travail”, 2007