Crise d'adolescence prolongée ou brillant coup promotionnel ? L'irrespectueux Justin Bieber n'a cessé, au cours des dernières semaines, de faire parler de lui pour finalement s'excuser juste avant la sortie de son nouvel EP dans lequel il rappelle à tous qu'il "n'est qu'un homme". Ce coup d'éclat nous a poussées à nous interroger sur les entreprises promotionnelles toujours plus extrêmes dans le domaine musical.

Le 29 octobre dernier, le jeune chanteur fait son premier coup d'éclat. Après seulement huit minutes d'interview et alors qu'il est encore à l'antenne, le jeune homme quitte les studios de la radio espagnole Los 40 principales pour ne plus y reparaître. Le lendemain, il met fin à son concert à Oslo après seulement une chanson. La cause ? Des fans du premier rang qui l'auraient empêché de nettoyer correctement la scène. Quelques heures plus tard, il poste sur Instagram son mea culpa : "J'espère que les gens comprendront ce que je traverse. Je ne gère pas toujours les choses de la bonne façon, mais je suis humain et je travaille à être meilleur pour répondre et ne pas réagir". Pourtant, quelques jours plus tard, une scène semblable se déroule lors d'une émission télévisée. Alors que tout paraît se passer au mieux et que les musiciens entament le refrain, accompagnés d'un public enthousiaste, Justin Bieber arrête tout sous prétexte que la foule ne tapait pas en rythme.

Comment comprendre ces coups de colère ? Une période vraiment difficile à vivre pour le chanteur ou un éclat promotionnel digne d'Hollywood ? En effet, c'est la question que nous pouvons nous poser dès lors que nous écoutons les paroles de sa nouvelle composition, I'll show you. "Parfois c'est difficile de prendre la bonne décision / Quand la pression se manifeste, ça tombe comme la foudre / On dirait qu'ils veulent que je sois parfait [...] N'oublie pas que je suis un homme, n'oublie pas que je suis réel." Dans la course à la célébrité, les tournées promotionnelles se doivent d'être toujours plus performantes mais aussi plus inventives. Pour autant, jusqu'où l'impertinence et la vulgarité pourront-elles porter ces artistes à se démarquer ?

"Sans limite" semble la seule expression qui puisse décrire les outils promotionnels et médiatiques dont font usage chanteurs et producteurs. Faire le buzz pour faire un maximum de bénéfice, voilà qui décrit très bien les agissements du rappeur allemand Bushido, qui, au lendemain des attentats de Charlie Hebdo, poste sur Instagram une photo de lui affublé d'un pull portant le nom de la capitale accompagné de la phrase "Bald geht es wieder Rund". Ce propos insinuant que de nouveaux attentats vont se produire est accompagné d'un hashtag ccn3, le nom de son nouvel album sortant quelques semaines plus tard. Relayée par tous les médias, son attitude irrespectueuse lui permettra d'être au centre de l'attention et de rester numéro un des charts pendant onze semaines en Allemagne et en Autriche.

Beaucoup d'autres exemples pourraient être listés comme le baiser échangé entre Britney Spears et Madonna à la sortie de leur duo Me Against the Music ou le clip sanglant illustrant le morceau Bitch Better Have My Money de Rihanna. Choquer pour faire parler de soi semble être devenu une condition nécessaire pour assurer le succès d'un album. À croire que la qualité musicale n'est plus l'argument de vente principal mais seulement un "plus" dans une industrie musicale saturée par un trop grand nombre d'artistes qui n'arrivent plus à trouver leur place. Les outils numériques ont rendu la création, la production ainsi que la distribution musicale accessibles à tous, créant un amoncèlement de nouveaux noms dans lequel les consommateurs se perdent. On pense donc nécessaire de nourrir de scandale et de vulgarité un public voyeur, de le racoler et de le pousser à l'indignation pour qu'il retienne le nom d'un artiste alors que s'illustrer par sa créativité serait bien plus gratifiant.

Ces excès promotionnels sont souvent accusés de mettre plus en valeur la personnalité du musicien que la qualité de l'oeuvre. S'ils permettent de faire le buzz et d'amener rapidement l'artiste au sommet de sa célébrité - qui ne dure jamais vraiment -, ils le font au détriment de la production. La frontière entre art et marché se brouille jusqu'à ce que la musique ne devienne plus qu'un moyen de faire du profit. En réaction à ce phénomène des artistes prônent un processus promotionnel reposant seulement sur leur art - quitte à en devenir quelque peu hermétique.
Un juste milieu est donc à trouver dans ce monde de l'information de masse où une bonne diffusion est devenue essentielle pour se démarquer.

 

Clara Bee et Apolline Mauger 

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