Du 9 septembre 2010 au 27 février 2011, REPORTERS SANS FRONTIERES expose au Petit Palais de Paris l’album de ses vingt-cinq ans : 100 photos de Pierre et Alexandra Boulat pour la liberté de presse.

 

              Camp d'entrainement pour femmes de l'académie de police de Téhéran ; par Alexandra Boulat.« Les photos de guerre que je fais aujourd’hui s’inscrivent dans la continuité des mondes imaginaires que je couchais sur mes toiles Â» : Alexandra Boulat (1962 – 2007), qui couvrit entre autres les conflits irakiens, serbes et afghans, revendiquait l’influence de son passage aux Beaux-arts sur son travail de reporter-photographe. Comment rendre « artistique Â» une photo témoignant, par exemple, d’un conflit ? L’exposition du Petit Palais donne à voir certaines de ses peintures : qu’il s’agisse de ces dernières ou d’un instantané montrant le jour des femmes à la mosquée de Mazar, c’est toujours l’éclat des couleurs qui accroche l’œil. Les clichés d’Alexandra subliment le réel : les manèges de la foire du trône et leur lumière n’ont jamais autant rappelé les vaisseaux de la saga Star Wars. Dans un registre plus sombre, la photographe montre le portrait –d’un blanc presque immaculé- de Shaima,  Afghane hospitalisée après s’être immolée pour s’affranchir de l’oppression de sa famille : on a davantage l’impression de faire face à un fantôme plutôt qu’à une jeune femme. Engagement politique et fibre artistique ne sont pas incompatibles ; enseignement sans doute hérité de son père.

            Pierre Boulat (1924 – 1998), qui travailla longtemps pour le magazine américain Life, oscille également entre deux conceptions de la photographie, reflet cru de la réalité (voir le bidonville de Nanterre dans la section Nord Africains à Paris) ou transfiguration du quotidien  (sur un cliché, le photographe crée un nouvel Hiroshima ; illusion parfaite et prouesse technique dues à la présence d’un nuage en forme de champignon atomique sur Paris). L’aspect technique n’est pas à négliger –même si son travail est uniquement en noir et blanc. Nous en avons confirmation en croisant Philippe, photographe amateur de 52 ans, devant un portrait instantané de Fellini, montrant celui-ci marcher pensivement, cigarette aux lèvres : « Pierrot ou Fellini c’est pareil. Toute la scène est en contre–jour tandis que Fellini est éclairé. Techniquement, réussir un instantané pareil c’est impressionnant, plus qu’une symbolique quelconque Â». Qu’est-ce qu’un reporter photo en somme ? Reporter engagé, artiste ou technicien zélé de l’image ? Un peu des trois sans doute. Le travail père-fille des Boulat en est une preuve. Ne serait-ce que pour constater cet état de fait, allez  vous-même jeter un Å“il du côté du Petit Palais. Voir l’air angoissé d’Yves Saint Laurent –alors inconnu- juste avant la présentation de sa première collection, ça n’a pas de prix. En l’occurrence, rappelons que l’entrée est gratuite.

 

 

                                                           Nicolas ROSA.





 

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